Réforme des retraites 2023

Retraites 2023 : une réforme de dupes

Pour ne pas dire « on veut baisser les droits à retraite », le gouvernement dit « le système est en danger ».

Michaël ZEMMOUR, Maître de conférences en économie à l’Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne et chercheur au LIEPP (Sciences Po), explique très clairement pourquoi et comment.

Les retraites concernent toute la population. Si la réforme Macron de 2020 a fini par être abandonnée, c'est en grande partie grâce mouvement social. La crise du covid lui a permis de s’en sortir par le haut. Mais il a de la suite dans les idées.

On vit plus vieux,
il faudrait donc travailler plus longtemps ?

L’argument est usé jusqu’à la corde. Ça fait des années que la durée de cotisation est rallongée. La dernière réforme, celle de Marisol Touraine, prévoyait déjà 43 ans pour les natifs de 1973. Le marché du travail n'a pas encore absorbé le passage de l’âge légal de 60 à 62 ans. La mise en œuvre de cette réforme n’est pas encore terminée mais déjà on veut réformer et pousser plus loin !

Un nouveau retraité aujourd'hui aura 1 an de retraite en moins que son homologue d’il y a 10 ans. Le taux de remplacement, c'est-à-dire le rapport entre le revenu du travail en fin de carrière et la pension de retraite, continue à se dégrader. On part dans des conditions moins favorables aujourd'hui qu’il y a 10 ans et sans réforme. C’est le Conseil d'orientation des retraites (COR) qui nous alerte sur ce point.

Le système des retraites est-il réellement en danger ?

La classe politique crie au loup, le système est en danger ! Pourtant actuellement il est équilibré, c’est encore le COR qui le dit. En revanche, si l’Etat se désengage financièrement, s’il prend l'argent des retraites pour le mettre ailleurs dans les finances publiques, le système sera déficitaire à l’horizon 2035-40. Ce ne sont pas les retraites qui créent le déficit mais la politique du gouvernement.

Dire « il faut très vite faire une réforme pour sauver les retraites » est purement de la mise en scène ! Le COR dans son rapport annuel de 2022 explique que les dépenses de retraite sont stabilisées voire en baisse, avant de procéder à la réforme.

  (a) L'âge de la retraite va reculer par application des réformes précédentes, notamment la réforme Touraine.

  (b) Le taux de remplacement dans le privé va baisser et ce ne sera pas mieux dans la fonction publique (les primes ne sont quasiment pas prises en compte dans les calculs des retraites).

Ce faisant, et malgré une démographie des retraités en hausse, les dépenses de retraite vont baisser. Avant la réforme 2023.

  Le danger n’est pas celui dont parle le gouvernement mais les conditions de départ à la retraite.

Le système est-il en déficit ? 

Il parait que ça coute cher à la société.

E. Borne parle de 12 milliards de déficit. Et brandit ce déficit comme si c’était le diable. Il faut savoir que le système de retraite collecte 300 milliards d'euros par an. Cela équivaut à un découvert de 100€ pour un revenu de 2500€/mois. C’est gênant mais pas dangereux, explique Michael Zemmour.

Ce qui est prévu, en gros, c’est de faire payer ces 12 milliards aux personnes qui sont aux portes de la retraite, celles qui ont entre 55 et 62 ans aujourd'hui. L’effort qui leur est demandé est énorme. Pourtant la retraite concerne toute la population active et les entreprises. Pourtant, il faudrait moins d'un point de cotisation pour trouver ces 12 milliards d'ici 2027, rappelle Michael Zemmour. Là ça ne ferait pas beaucoup.

Il y a déficit lorsque les recettes sont inférieures aux dépenses.

Or, puisque les dépenses baissent, le déficit devrait se résorber.
S’il persiste
c’est parce que les recettes baissent aussi et, avec cette réforme, elles vont baisser plus vite que les dépenses : baisse de l'impôt sur la fortune, suppression de la taxe d'habitation, suppression de la redevance télé et aujourd'hui baisse des impôts de production prévue pour 2023-24.

L'État va avoir moins de retraites de fonctionnaires à payer dans le futur et il aimerait en profiter pour diminuer sa participation au système. Ce n’est donc pas le système de retraite qui ne fonctionne pas. Mais la politique de l’Etat qui construit le déficit. Ceci dit, de nombreuses structures sont en déficit et « ça ne fait pas tout fermer. »

Le fonds de réserve

En outre, malgré les cris d’orfraies de la classe politique, cela n’a rien à voir avec une explosion incontrôlée des retraites. Au contraire, un tel déficit ne menace pas le système. Un fonds de réserve avait justement été prévu pour combler les trous accidentels. Mais les gouvernements successifs l’ont siphonné.

En l’absence de fonds de réserve, un emprunt sur 10-15 ans est envisageable, c’est une deuxième option. La troisième option étant l'augmentation des cotisations. Pour éviter un déficit au cours des 4-5 ans à venir, il faudrait une augmentation inférieure à 0,15 points par an des cotisations, employeur et salarié. Sachant que, entre 2010 et 2020, les fonctionnaires ont subi une hausse des cotisations de 0,27 points par an, c’est assez peu. Pas de quoi crier au feu.

En résumé et c’est le COR qui le dit :

(a) les dépenses sont en baisse

  (b) le déficit n'est pas dangereux

   (c) c’est le niveau des pensions qui devrait nous inquiéter.

Les objectifs réels de la réforme sont ailleurs

Le projet de réforme ne s’appuie nullement sur un diagnostic du système des retraites dans son état actuel. C’est, en revanche, un enjeu de finance publique relatif aux baisses d'impôts des grandes entreprises multinationales.

En d’autres termes, si le gouvernement veut précipitamment mettre en place une réforme des retraites c’est parce qu’il a besoin d’argent pour financer les baisses d'impôts offertes aux multinationales et que les dépenses de retraite ne baissent pas assez vite à son gout. Voilà ce qu’analyse Michael Zemmour.

1- La réforme fera faire des économies

La baisse des impôts de production est engagée depuis 2020. Pour que cela ne creuse pas trop le déficit public Bruno Le Maire veut faire des économies sur les dépenses publiques. Or, du côté des fonctionnaires, il n’y a plus grand chose à réduire.

Que peut-on faire ?

Utiliser un autre levier,
celui des économies massives sur les retraites. Le projet de loi de finance de 2023 l’annonce, de même que le dossier remis à la Commission européenne. Ce qui n’a rien à voir avec un projet issu d’un diagnostic sur l'emploi des seniors ni sur les conditions de départ à la retraite ni sur la santé des caisses de retraite.

Augmenter l’âge légal de départ à la retraite de 62 à 64 décale les départs de 2 ans. Autant d’années où l’Etat ne paye pas les pensions de retraites. Ainsi l’Etat fait des économies à court terme sur le dos des gens au seuil de la retraite (55 ans et+).

Augmenter la durée de cotisations plus rapidement que prévu a un effet similaire.

2- La réforme va mettre en tension le marché du travail,
notamment pour les seniors

L’autre effet de la réforme des retraites : la pression sur le marché du travail.

Avec le report de l’âge légal de départ, la réforme va mettre davantage de seniors sur le marché du travail. Cela va contribuer à une production plus grande de richesses et donc accroitre le PIB. Très bien.

Quand l’offre de main d’œuvre s’accroit, la concurrence entre salariés augmente. Résultat : plus difficile de négocier des hausses de salaire. Méthode classique.

Et en période d'inflation : baisse de pouvoir d'achat assurée.

La réforme des retraites, c’est travailler plus longtemps avec moins de prétention salariale.

Pourtant, l’emploi des seniors est un vrai problème.

Le taux de chômage au seuil de la retraite est très élevé. Le licencié de 58 ans ne retrouvera pas de travail. En gros, 3 personnes sur 10 passent par une période de chômage, voire chômage sans indemnités, avant la retraite. La réforme va durcir la situation. Ils seront alors bien plus nombreux à être dans une situation intenable avant la quille de la retraite. On passe de 36 mois d’indemnisation à 27 mois en 2023, même sans la réforme ! Donc si le départ à la retraite est repoussé, la durée sans travail est allongée !

L’accompagnement de l’emploi c’est : ceux qui pourront tenir tant mieux, les autres passeront par la case pertes et profits.

Surtout pertes…

Conclusion

Cette réforme ne se fera pas au bénéfice des retraités mais à celui des grandes entreprises. Le gouvernement veut faire des économies sur les dépenses publiques, la solution qu’il envisage actuellement est de tondre la laine sur le dos des retraités.

Michaël ZEMMOUR, Maître de conférences en économie, Pour en savoir plus  ici et et aussi.

 

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