Robot androide peur

Les robots vous font-ils peur ?

Une fois n’est pas coutume je vais vous parler de moi, ou plutôt de mon petit-fils.

Il a 15 ans.

Depuis 3 ans, il passe tout son temps libre à son club de robotique. Au début il a fabriqué une plateforme à roulette qui transporte un Smartphone d’un bout à l’autre de la table, lorsqu’il se met à sonner. Pour les gens qui ont du mal à se déplacer c’était plutôt bien vu.

Maintenant, il passe le plus clair de son temps à fabriquer un robot capable de se saisir d’une boite, de la pousser, de la soulever, de la poser sur un plateau. Et pourquoi faire ?
et bien pour participer à une compétition internationale, un jeu d’équipe organisé par FIRST (For Inspiration and Recognition of Science and Technology, Huston, USA).

Ça n'a l’air de rien, mais avec son équipe (une vingtaine de garçons et filles de 15 à 17 ans) il vont devoir imaginer, designer, construire, faire des réglages et adopter une stratégie de jeu, en équipe.

Leur robot est commandé par Smartphone… grâce à un programme compliqué conçu par l'équipe. Le capitaine de l’équipe, qui sera aux manettes, a une lourde responsabilité mais il est préparé et soutenu par les autres membres de l’équipe. Enorme travail de conception ergonomique et électronique.

Le robot ressemble à une sorte de boite montée sur roulettes sur la quelle est fixé un plateau, à l’horizontale. Il est fait en bois, avec des parties métalliques, de l’électronique et beaucoup, beaucoup de créativité.

Les robots forment la jeunesse ?

C’est aussi un projet très formateur sur le plan des connaissances scientifiques, des savoir-faire, du travail en équipe et du management de projet. Il y a plus de 2600 équipes aux USA. Normal. 206 au Canada, 62 en Israël, 3 aux Pays-bas et… 2 en France…

Les petits voiliers télécommandés du jardin des Tuileries étaient plus sympathiques à regarder que le robot de mon petit-fils mais ils savaient faire moins de choses.

Pourtant, les robots, ça fait souvent peur.

Regardez Kasparov, ce grand joueur d’échec. Il a perdu devant un ordinateur ! Signe que les robots un jour dirigeront le monde ?

C’est aller un peu vite en besogne que de penser cela. Ne croyez-vous pas ?

Avant d’y réfléchir ensemble, je vous propose de passer en revue les bonnes raisons qu’ont certaines personnes d’avoir peur.

Peur des araignées ? Non, des robots !

Ils arrivent, maman, j’ai peur !

Tout le monde est d’accord pour dire que les robots vont nous rendre beaucoup de services, dans le domaine de la santé, de l’éducation, du tourisme, de la compagnie pour les personnes âgées, et ainsi de suite. Mais, beaucoup pensent qu’ils vont aussi poser des tas de problèmes auxquels nous n’avons pas pensé et que nous ne saurons pas résoudre.

Un monde sans âme

A partir de là, ils croient que les humains seront remplacés par des robots, que notre monde sera déshumanisé. Quelle angoisse pour nous autres, faits de chair et d’os. Notre monde n’aura plus d’âme…

Les roboticiens (ces gens maléfiques et malintentionnés ? ) vont-ils finir par fabriquer des robots plus intelligents que l’Homme ? Pas très rassurant ! L’intelligence artificielle sera-t-elle un jour supérieure à l’intelligence humaine ? Bigre !

J’ai lu aussi sur Internet des choses qui font frémir : « On fabrique des robots d’apprentissage mais on ne sait pas avec quoi on joue ! Nous, humains, sommes les cobayes, nous expérimentons les relations homme-machine imaginées par les roboticiens. » Certains disent même que, au Japon, des robots humanoïdes se marient avec des humains. On dirait Neandertal et Homo Sapiens, dis-donc !

Qu’ont-ils donc ont dans la tête ?

Parfois, lorsque mon ordinateur ne fait pas ce que je lui demande, je me fâche, je m’énerve (et je bidouille un peu aussi). C’est bien la preuve qu’il me comprend et qu’il n’en fait qu’à sa tête !

Alors, un robot, pensez donc ! Ça va bientôt avoir des sentiments, on va s’attacher… Pourtant, « on ne sait rien de leur intériorité… » Un jour ils auront une âme ! 😉 « Méritent-ils réellement la confiance qu’on leur accorde alors qu’on comprend si mal leur logique ? »

Ah les choses commencent à se dessiner. C’est peut-être bien parce que la plupart des gens ne connaissent rien (ou pas grand chose) à la robotique qu’ils ont peur…

Des robots tueurs et qui menacent notre vie privée

Et les applications militaires ! Oui, les drones armés. Qu’est-ce que vous en faites ? On les rencontre aujourd'hui sur tous les terrains opérationnels et les conflits armés. Y’a aussi des drones qui font du déminage… 😉 Mais le drone, est-il un robot ?

Aujourd'hui ça va encore, mais demain ? Interrogent les suspicieux. Oui, demain…

« La technologie des robots n’est pas encore au point ! Les fabricants voudront savoir… pourront savoir ce que nous faisons, 24 heures sur 24, grâce aux capteurs des robots. Au secours ! Ils sauront tout de notre vie privée." Ils voient des nains partout ? Non des robots malfaisants et des complots terrifiants. Ceci dit, les Google, Facebook et autres GAFA en savent déjà très long sur chacun de nous.

Alors Mamie, un robot, qu’est-ce que c’est ?

Pour commencer, il faudrait peut-être savoir de quoi on parle.

Pour être précis, je dirai qu'un robot est un dispositif “mécatronique”, c'est-à-dire qui allie intelligence artificielle, mécanique, électronique et informatique. (Je reprends ici la définition qu’en donnent Sophie Lacour et Patrick Vicériat).

Un robot est composé :

(a) de circuits électriques et de microprocesseurs, pour faire tourner les logiciels informatiques
(b) d’éléments mécaniques (moteurs électriques rotatifs, vérins hydrauliques) pour agir, pour bouger
(c) d'interfaces tactiles, de capteurs et de sondeurs pour guider son action

Il y a deux grandes catégories de robots : les robots industriels et les robots de service.

robot voiture montage

Mais si ! les robots industriels, ça fait bien longtemps qu'il y en a. Et les voitures, comment croyez-vous qu'on les monte ?

Certains robots ressemblent à un chat, ou à un chien ou à une tortue. D’autres encore ont une forme humaine, on les traite alors d’humanoïde… et je crois que c’est surtout ceux-là qui font peur !

Pourtant, la plupart des robots ne ressemblent à rien de connu. On leur donne la forme et le design qui conviennent le mieux à ce qu’on souhaite leur faire faire.

Un robot informatique (dénommé bot) est un logiciel qui interagit de façon automatique avec des serveurs informatiques.

C'est un robot virtuel, un petit programme informatique, sans plus. Qui peut surveiller et corriger des bugs (des pannes) ou faire l'espion…

Je suis certaine que vous connaissez des tas de robots : aspirateurs, tondeuses, nettoyeur de piscine. Et le métro automatique ? Qu’est ce que c’est sinon un robot ? L’idée c’est quand même de faire faire par une machine, un robot quoi ! des travaux pénibles ou dangereux, surtout quand ils sont répétitifs.

Angoisse irrationnelle et science fiction

Les robots, c’est du réel et pas de la science fiction.

Dans les films de science fiction, les robots, ont une forme humaine et joue des rôles terrifiants. Ils viennent nous attaquer, nous dominer, nous anéantir…

La peur des robot est tout simplement construite sur les mythes de la science-fiction : les robots seraient des quasi-humains, capables de nous attendrir et de nous faire pleurer. Et surtout assez habiles pour prendre le pouvoir. Ils nous fascinent autant qu'ils nous font peur.

Parler des robots crée de l’angoisse. Pourtant un robot ce n’est pas un loup-garou.

Le mythe du Golem, les androïdes de Capek sont réactivés.

La nuit tombe sur Prague. Nous sommes il y a bien longtemps, un peu après le moyen âge. Le rabbin Löwe, gardien de la communauté juive, se glisse furtivement dans le sous-sol de sa synagogue. Il va donner vie à une créature inanimée, faite d’argile et de boue venant des rives de la Vltava, en inscrivant le mot EMET sur son front. Cette créature — le Golem — aura pour mission de protéger la communauté de l’hostilité ambiante et des pogromes.

Bon, je vous passe les détails. Objets inanimés, avez-vous donc une âme ? demandait Baudelaire. Un jour, le Golem sort de sa routine habituelle et dévaste tout sur son passage…

Il est incontrôlable. Rassurez-vous, son maitre l’a détruit… et c’était il y a longtemps.

Le schéma du mythe est assez simple :

L’homme créé une créature humanoïde intelligente pour la mettre à son service.
La créature grandit et commence à échapper au contrôle de l’homme, puis se rebelle.
2 options sont alors possibles : soit l’homme la détruit, soit il se fait détruire.

Comment ne pas avoir peur    Et si fabriquer un homme sans âme devenait possible ?

L’histoire du Golem vous a fait penser à Frankenstein ? C’est en effet un peu la même histoire que celle publiée en 1818 par Mary Shelley.

Plus tard, Isaac Azimov (1920-1992), illustre romancier de science fiction, a appelé cette terreur « le complexe de Frankenstein » autrement dit : la peur de l'homme mécanique… ou électronique !

L’homme qui a outrepassé ses capacités de mortel en s’octroyant le droit divin de donner la vie, doit être puni. Les Grecs anciens appelaient ça l’hubris, le péché de démesure, celui de vouloir se faire l’égal des dieux.

Robot, quel drôle de mot

Le mot robot vient du tchèque robota c'est-à-dire travail forcé. En russe, rabotath’ signifie travailler.

Robota est le terme utilisé par Karel Capek pour désigner les androïdes, clones humains, conçus pour le travail dans RUR écrit 1920 pour le théâtre. Il met en scène tout l'imaginaire fantasmatique des robots tel qu’il ressort aujourd'hui dans les terreurs (signalées plus haut).

C’est aussi le mythe de Prométhée, éternellement puni par Zeus pour avoir volé le feu  possédé par les dieux et l’avoir donné aux hommes. Histoire issue de la mythologie grecque qui reflète l'ambiguïté du feu, dangereux ami : le feu nous réchauffe, nous aide à cuire les aliments, nous éclaire mais nous brule et incendie nos maisons.

Moralité : l’objet artificiel nous captive, nous subjugue. Mais dès qu’il devient trop parfait, qu’il imite trop « fidèlement » l’homme (ou la femme, pour sur), la réaction s’inverse radicalement et devient négative. L’admiration, l'envoutement devant cette sorte de magie se transforme. Malaise, méfiance, incompréhension… peur.

robot androide

Robot humanoïde sans conscience

Fantasmes ! Fantasmes !

L’intelligence d’une machine n’a rien à voir avec l’intelligence et la conscience humaine.

L’intelligence d’une machine ne vaut que par sa programmation, sa capacité de calcul, sa rapidité à effectuer des tâches. Une machine peut savoir compter, identifier, chercher dans des listes (et trouver!), établir des corrélations et bien d’autres choses que l’on aura programmées pour elle.

Mais la pensée humaine, la conscience de soi, la conscience des autres, la spiritualité sont trop complexes pour être modélisées.

Oui mais — direz vous — regardez Alexa (Amazon) ou Google Home (Google). Et tous ces robots japonais. Ces machines savent apprendre, sourire, nous réconforter.

Certes, Google Home nous dit « je vais apprendre avec l’aide de mon équipe ». En fait, ces apprentissages sont des mises à jours (silencieuse) constituées grâce à l’info recueillie pendant l’utilisation. On n’est toujours pas dans la conscience humaine.

Magie bleue

On a devant soit un petit objet de forme cylindrique. On lui parle directement en français (ou anglais) comme on le fait déjà parfois sur son téléphone. La petite intelligence artificielle dans la boîte va comprendre l'ordre et tenter de l'exécuter.

  • allume la lumière du salon
  • est-ce que j'aurai besoin d'un parapluie aujourd'hui ?
  • quelle est la circulation en ville aujourd'hui ?
  • lance un minuteur pour 3 min’
  • joue-moi Let it be des Beatles
  • combien de Grand Chelem Nadal a-t-il gagné? (En l'occurrence 16, c'est ce que vient de me dire le Google Home que j’ai devant moi)

Whouaou ! C’est magique !

Ben non ! Au delà de commandes domestiques ou ludiques, la sympathique petite machine utilise l'ensemble des informations référencées dans Google et Wikipédia.

Ce type de machines, que l’on peut appeler robot, est un véritable assistant personnel disponible à la voix aussi bien à la maison que dans son téléphone.

La peur par ignorance

Condorcet disait que l’ignorance nous rend esclave de ceux qui savent. Le savoir nous donne la liberté. La peur des robots — robot essentialisé, robot indéfini, terminologie qui crée l’ambiguïté (intelligence) — est irrationnelle. Elle permet de trouver une explication (simpliste) à ses angoisses existentielles.

Un robot (voir plus haut la définition) n’est qu’un instrument. Ou plus précisément, la robotique est la discipline qui permet de construire ces outils sophistiqués… capables du pire et du meilleur : des robots tueurs dans des zones de combat et des robots chirurgiens pour sauver des vies.

La question acceptable à se poser est celle de l’emploi.

Ce qui peut à la rigueur justifier la peur, c’est le chômage.

Si des machines font le travail pénible ou dangereux que faisaient les hommes, les hommes n’auront plus de travail, et donc plus de subsistance.

Est-ce nouveau ?

Les mines de charbon ont progressivement été fermées en Europe. Les mineurs ont disparus. Pareil pour la sidérurgie. Pareil dans les ports, avec les grues à containers. Et le maréchal ferrant ? Vous en connaissez un, de maréchal ferrant ? Et celui qui criait sous vos fenêtres « vitrii-er » ou « maaar‘chand’ail » et le rémouleur ? Ça fait belle lurette que ces métiers ont disparus.

Alors ?

Lisez donc « c’était mieux avant » et vous verrez…

 

On pourra lire aussi : La nouvelle servitude volontaire : Enquête sur le projet politique de la Silicon Valley de Philippe Vion-Dury (2016)

 

 

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